La rue marchande... sa faim l'avait attirée là. Elle y était . Sa faim n'était pas grande au point d'aller, comme elle l'avait fait , se précipiter dans la rue marchande. Mais il y avait un autre élément, ô combien important, dans l'affaire. La présence d'un intrus. Un intrus ? Le mot était faible. En plus, fait qu'elle ignorait, quoiqu'elle s'en doutait surement, c'était l'eskah qui avait détruit sa vitre. Son acte était totalement injustifié. Stupide. De toute façon, quoi de plus stupide qu'un eskah. Des simples humains avec des pouvoirs, qui veulent rester comme ça, ils n'ont donc aucune ambition ?! Et la plupart d'entre eux deviennent des Eskahs. Des Eskahs ? Cette pensée lui inspira un petit rire. Les Eskahs sont ceux qui les empêchent de faire leur devoir. Oui, ceux qui sont capables d'abandonner leur âme pour un simple rêve, parce qu'ils sont trop lâches pour y arriver eux-mêmes, ne sont que des lâches, des lâches répugnants. Ils méritent la mort. Une mort cruelle, lente, empreinte de souffrance, une souffrance... délicieuse. On sent leur faiblesse écrasante, ils sont incapables de défendre leur famille, tout ce qui comptent pur eux. En fait, ils sont un peu comme des enfants, des enfants qui iraient se cacher sous la jupe de leur môman.
Elle marcha d'un pas lent, calme. Trop calme, si on peut dire ça, d'un calme effrayant. Du calme du bourreau qui va abattre sa victime sans ressentiment, puisque c'est pour la Justice, enfin, plutôt pour sa justice.
Elle ressentait une légère douleur au pied, peut-être une des raisons de sa lenteur effrayante. C'était quand elle était tombée. Elle avait eu peu mal, sur le coup, mais sa douleur s'accentuait au fur et à mesure. Maintenant, en plus de sa faim, qui, faible au début, croissait de plus en plus et l'oppressait, elle ressentait une fatigue violente, une envie de rentrer à l'hôtel, mais elle devrait croiser ce démon de Reïhar. Et s'il y avait bien quelque chose qu'elle ne voulait pas, c'était bien le croiser...
* C'est une pourriture. Pourquoi vit il ? Ce genre d'homme a t'il un but, une ambition, à part de pervertir le monde, on sent qu'il a envie de tuer, qu'il doit tuer des gens, sans aucune raison, juste pour satisfaire son besoin. C'est minable, ce genre d'attitude. Cet homme attire ma haine. Mais, il provoque surtout chez moi la peur. Plus je le vois, plus je me dis que tous les malheurs du monde sont liés à cet homme, une telle personne ne peut vivre, c'est une héresie, l'apocalypse viendra de lui ou ne viendra pas. *
Puis, sans même sans rendre compte, elle continua à penser. Mais à voix haute. Cela lui arrivait souvent. Elle commença faiblement mais le volume de sa voix n'avait de cesse d'augmenter. Le plus étrange, c'est qu'elle ne s'en apercevait pas. Cela lui avait déjà valu des ennuis, il suffisait qu'elle mette trop de coeur dans ses pensées, et elle sortait à travers sa bouche.
" Que faire contre cet homme ? Il est trop malin, fourbe, réfléchi pour tomber dans un piège. Et puis je hais les pièges. C'est honteux de tenter de tuer quelqu'un et qu'il meure avant de comprendre d'avoir été trahit. Je suis heureuse d'avoir ce pouvoir. Personne ne peut me tuer d'une manière lache. Enfin bon..... Hum .... Comment cela se fait-il que tout le monde me regarde ? Je suis mal coiffée ? Mes vetements ont une déchirure ? "
Elle regarda vaguement ses vetements et appliqua ses mains sur ses cheveux, sans résultat aussi.
Elle comprit alors, et seulement à ce moment, c'est dire à quel point cette fille est ... diffèrente, qu'elle parlait toute seule. C'est un symbole de folie. Elle ne trouvait pas qu'elle était folle. C'était plutôt un signe de réflexion pour elle. Et ses pieds étaient encore plus douloureux. Encore plus. De plus en plus. Un creshendo de douleur. C'est souvent infernal une douleur qui augmente. Mais elle n'allait quand même pas s'arrêter au milieu de la rue. Déjà qu'elle s'était fait enormement remarquer en parlant seule.
Soudain, elle lacha un
" Merde "
sonore.
Elle avait completement oublié de regarder où elle pouvait avoir de quoi manger. Elle regarda derrière elle, il y avait une grande surface ( enfin, de taille relative à celle du village ) à cent mètres d'elle, c'était inutile de faire demi-tour, ça lui prendrait autant de temps que d'aller à la boulangerie qui se dressait devant elle. Elle avança péniblement jusqu'à sa destination. Arrivée! La fin de son calvaire pour un court moment. Elle regarda les prix, qu'elle trouva horriblement trop exhaustifs. Si ses pieds n'étaient pas entre elles et l'autre magasin, elle y serait allée en se pressant . La souffrance est souvent quelque chose de castratif. Elle penetra d'un pas faible dans la boulangerie et demanda, en cherchant un des tons les plus polis existant :
" Bonjour, je voudrais un de vos sandwichs. "
" Vous ne pouvez pas me dire quel type de sandwich vous voulez, ou c'est au dessus de vos capacités "
C'était une vieille dame qui devait sans doute tenir sa boutique depuis une vingtaine d'années et avait perdu toute joie depuis la mort de son mari, songea Yuffie. Mais ce n'était pas une excuse. Yuffie sentit monter une vague de haine envers cette dame. Elle retorqua alors d'une voix terrible, honorant son plus grand défaut, le fait de s'enerver très vite :
" Tu as interet à me parler beaucoup "
elle accentua ce mot de façon hyperbolique
" plus poliment, avec tout le respect que tu me dois , si tu ne veux pas mourir, pitoyable humaine. "
Puis, elle ajouta, avec une voix de petite fille sage :
" Je prendrai un jambon-beurre, s'il vous plaît ."
La dame la servit sans pouvoir ajouter un mot. Yuffie posa un billet, le billet le moins cher au comptoir de la dame, ramassa sa nourriture et déclara méchamment :
" Garde la monnaie, ça t'aidera à enrichir ton entreprise minable. Ah oui, j'oubliais. Tu n'as rien vu, rien entendu, sinon, la mort ta paraîtra bien douce à côté du chatiment que je te reserverai. "
Elle entendit sonner la carillon de la porte d'entrée, annonçant un client. Son visage changea alors radicalement d'expression et elle déclara :
" Au revoir madame ." Puis elle sortit péniblement.
Son sandwich ne fut l'affaire que d'une dizaine de minutes et lui coupa sa faim, mais laissa sa douleur intacte. Pourtant elle ne la ressentait plus vraiment. Depuis qu'elle avait fini son casse-croute, elle reflechissait à ses actes dans la boulangerie. Est-ce que la boulangère allait dire quelque chose ? Elle ne pensait pas, elle avait du être horrifiée. Mais si elle le faisait, quel résultat cela amenerait ? Rien de grave, pensa t'elle au bout d'une courte reflexion. Je suis une collectrice d'âme, je suis toute puissante, même les Eskahs ne peuvent rien contre moi. A cette pensée elle lacha un rire sonore. Les regards se tournèrent vers elle.
Aucune importance ! Maintenant, retour à l'hôtel.